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Rassegna bibliografica
Settecento

Oser l’Encyclopédie. Un combat des Lumières, édité par Alain Cernuschi, Alexandre Guilbaud, Marie Leca-Tsiomis, Irène Passeron, avec la participation de Yann Sordet

Katalin Bartha-Kovács
p. 160
Notizia bibliografica:

Oser l’Encyclopédie. Un combat des Lumières, édité par Alain Cernuschi, Alexandre Guilbaud, Marie Leca-Tsiomis, Irène Passeron, avec la participation de Yann Sordet, Paris, EDP Sciences, 2017, 118 pp.

Testo integrale

1Pourquoi oser? L’entreprise encyclopédique, que présente ce livre censé accompagner l’édition numérique et critique de l’Encyclopédie mise en ligne en octobre 2017, relèverait-t-elle de la gageure? Le titre de l’ouvrage suggère en tout cas cette question au lecteur, et la citation encadrée à la première page de titre – tirée de la définition de l’article «Oser» de l’Encyclopédie – y fournit la réponse. À l’époque des Lumières, il s’agissait effectivement d’une entreprise audacieuse dont ce petit ouvrage esquisse les étapes majeures. Comme l’explique la préface de Catherine Bréchignac, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, l’actualité de sa publication est la numérisation des 28 volumes de l’Encyclopédie. Elle est le fruit de la collaboration de plus de 120 spécialistes dont les quatre auteurs, Alain Cernuschi, Alexandre Guilbaud, Marie Leca-Tsiomis et Irène Passeron, qui avaient la tâche de coordonner l’édition et qui ont également signé ce livre.

2Ayant une structure équilibrée, celui-ci se compose de dix chapitres (eux-mêmes divisés en plusieurs sous-chapitres), d’une préface, de la courte présentation des auteurs, d’un avant-propos et d’une chronologie, et se termine par une bibliographie sommaire. L’avant-propos souligne que la nouvelle édition de l’Encyclopédie est librement accessible à tout public et présente les sujets abordés dans l’ouvrage. Le chapitre «Qu’est-ce que l’Encyclopédie?», qui sert à introduire les autres, met l’accent sur les héritages et les innovations de la plus grande entreprise éditoriale de son temps: le travail collectif, l’intégration des arts mécaniques au domaine des connaissances, l’importance des illustrations, le réseau de renvois (qui annonce, en effet, le système des hyperliens) mais, avant tout, l’esprit critique.

3Chaque chapitre est consacré à une question spécifique ayant trait à l’Encyclopédie. Le premier aborde les étapes de son histoire éditoriale mouvementée et les batailles autour de sa publication; le suivant traite du caractère collectif de cette œuvre polyphonique car réunissant près de 200 collaborateurs, et présente les trois figures majeures de l’entreprise: le principal éditeur Diderot au génie universel, le savant D’Alembert, coéditeur entre 1747 et 1758, ainsi que le chevalier de Jaucourt, collaborateur régulier et fidèle à l’entreprise encyclopédique. Sont passées en revue ensuite les sources de l’Encyclopédie: la Cyclopaedia de Chambers, le Dictionnaire de Trévoux et les séries académiques où les collaborateurs de l’Encyclopédie ont puisé. Aux savoirs empruntés, ils ont pourtant ajouté des savoirs vivants, témoignant de l’actualité scientifique du xviiie siècle dont l’inoculation – ancêtre de la vaccination, propagée par le médecin genevois Théodore Tronchin – ou encore la nouvelle science de l’étymologie. Mais l’Encyclopédie est, avant tout, une œuvre critique: comme le souligne le livre, l’esprit critique s’y manifeste par l’écho aux combats politiques, religieux et moraux de l’époque. On apprend également que la reconnaissance des arts et métiers appartient aux innovations de cette gigantesque œuvre qui veut enfin rompre avec le mépris des métiers manuels, les décrit de manière détaillée et les illustre par les planches. Le livre évoque encore les problèmes posés par la correspondance entre les volumes de texte et de planches lors de la numérisation et mentionne les solutions apportées pour y remédier. Un chapitre s’occupe de la structure labyrinthique de l’Encyclopédie, de l’organisation du réseau des connaissances et du système des renvois. Les successeurs de cette entreprise sont aussi mentionnés, à savoir les projets qui ont repris, aux alentours des années 1780, le programme encyclopédique (comme l’Encyclopédie d’Yverdon ou l’Encyclopédie méthodique). Le dernier chapitre rappelle, enfin, les principes de l’édition numérique et précise que l’édition de référence servant de base à la numérisation était l’exemplaire original et complet conservé à la Bibliothèque Mazarine.

4En fin de compte, ce livre remplit parfaitement sa fonction: il donne envie de découvrir – et de redécouvrir – l’Encyclopédie. Il parvient, d’une part, à éveiller l’intérêt du grand public à l’égard de cette entreprise sans égal du xviiie siècle; d’autre part, il indique aux spécialistes d’éventuelles pistes de recherche comme la question (toujours ouverte) de l’attribution des articles ou le fait que la plupart des dessinateurs et graveurs de l’Encyclopédie sont encore mal connus. La problématisation pertinente et les explications bien claires sont le grand mérite de ce petit livre illustré de nombreuses images. Elles agrémentent la lecture, aussi bien que les citations encadrées, tirées de l’Encyclopédie.

5Dans le cas de la numérisation de l’Encyclopédie, le terme «oser» a également toute sa validité. Il fallait sans doute avoir du courage et de l’assiduité pour réaliser l’édition servant de base au livre: l’Édition Numérique Collaborative et Critique de l’Encyclopédie (ENCCRE) dont le grand atout est qu’il s’agit d’un ouvrage en devenir, d’un ouvrage ouvert qui reste en cela fidèle à l’esprit de l’œuvre emblématique du siècle des Lumières.

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Katalin Bartha-Kovács, «Oser l’Encyclopédie. Un combat des Lumières, édité par Alain Cernuschi, Alexandre Guilbaud, Marie Leca-Tsiomis, Irène Passeron, avec la participation de Yann Sordet»Studi Francesi, 187 (LXIII | I) | 2019, 160.

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Katalin Bartha-Kovács, «Oser l’Encyclopédie. Un combat des Lumières, édité par Alain Cernuschi, Alexandre Guilbaud, Marie Leca-Tsiomis, Irène Passeron, avec la participation de Yann Sordet»Studi Francesi [Online], 187 (LXIII | I) | 2019, online dal 01 juillet 2019, consultato il 28 mars 2024. URL: http://journals.openedition.org/studifrancesi/16379; DOI: https://doi.org/10.4000/studifrancesi.16379

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